Vidéo Séance d’information dans la salle du Conseil de la ville de Magog
Madame,
J’ai écouté attentivement vos réponses lors de la séance d’information tenue à Magog le 27 janvier dernier, et j’ai été déçue de constater votre manque de connaissances en la matière. Vous trouverez ci-après ma critique à l’égard des commentaires que vous avez exprimés pendant cette séance d’information.
Vous avez mentionné : « Je suis praticienne de santé publique, les radiofréquences ce n’est pas pour nous un enjeu de santé »
Vous confirmez que, malgré le fait que la technologie sans fil continue à se développer à pas de géant et que son utilisation croît chaque jour davantage, vous n’êtes, ni comme médecin, ni comme individu, ni comme mère, le moindrement curieuse de savoir si cela pose le moindre risque. Comme médecin, vous savez pourtant qu’il y a un risque probable, et de plus en plus d’études le démontrent… Comment est-il possible qu’en tant que professionnelle, vous ne vous sentiez pas interpellée?
La bande utilisée par les compteurs est de 900 MHz (902 à 928 MHz) et elle est exempte de licence. Afin que les compteurs de tous les utilisateurs puissent communiquer simultanément, ils doivent utiliser une technologie à sauts de fréquence (et 82 canaux sont utilisés). Ces bandes en chevauchent d’autres et créent des harmoniques que personne ne peut prédire ni reproduire… Et cela ne préoccupe pas la Santé publique?
Vos croyances se basent sur le Code de sécurité 6. Toutefois au moment de la conception de ce code, l’exposition ambiante aux radiofréquences/micro-ondes en Amérique du Nord était d’environ 10 milliards de fois inférieure à celle que Protégez-vous / Poly ont mesurée à l’intérieur comme étant l’exposition « ambiante » en 2012!
Comment pouvez-vous affirmer que, ni pour vous, ni pour votre ministère, les radiofréquences (RF) ne sont une préoccupation? Je vous invite à écouter ce webinaire du Dr David Carpenter qui a reçu son diplôme de médecine de l’École de médecine de Harvard et, pendant plus de 25 ans, il s’est concentré principalement sur la maladie humaine résultant de l’exposition aux contaminants environnementaux comme les métaux lourds, PCB, l’uranium appauvri et les fréquences électromagnétiques ou la pollution CEM. « Health Effects of Électromagnetic Fileds ». Minutes 8 :38 – 54 :48, période de questions 54 :49 à 1 :20 :00. Cet expert que la Régie et Hydro-Québec ont qualifié d’incompétent : il a surveillé/dirigé des programmes de recherche pour l’État de New York. Il a été désigné officiellement porte-parole de l’État concernant les champs électromagnétiques alors qu’il était employé de l’État de New York (1980-1998). Il a été invité à témoigner devant le Congrès américain et devant le President’s Cancer Panel de l’Institut national du cancer sur cette question (RF et cancer). En plus du rapport BioInitiative, il a édité deux livres et publié bon nombre d’articles sur les RF dans des journaux révisés par ses pairs. En outre, il a publié plus de 300 études sur d’autres polluants environnementaux. Le Dr Carpenter est, sans aucun doute, un expert en la matière. « Je suis tout à fait critiqué par plusieurs, la majorité d’entre eux sont en conflits d’intérêts ou simplement désinformés. Mon devoir, comme médecin en santé publique, est de m’exprimer sur toutes les questions où il y a une preuve qu’elles causent la maladie ou des blessures chez l’humain, même si les mécanismes spécifiques ne sont pas encore élucidés; c’est la base du Principe de précaution. » On peut bien se demander si ce n’est pas le fait que le docteur Carpenter ait été chargé du Projet Powerline de New York qui a prouvé la dangerosité de vivre à proximité des pylônes électriques, un fait qu’Hydro-Québec nie avec force, qui a motivé HQD à tout faire pour entraîner le refus du témoignage de ce grand homme et chercheur.
« Presque scientifiquement impossible de prouver le non-risque »
Ce qui est impossible à mesurer dans notre quotidien, c’est une seule bande de fréquences : la séparer de toutes les autres sources de pollution électromagnétique est rendu pratiquement impossible. Pour cette raison, les études se font en laboratoire, dans des cages de Faraday. Sachez que si nous pouvions voir tous les rayonnements des champs électromagnétiques (CEM) qui nous entourent, incluant les radiofréquences et les micro-ondes, nous ne pourrions pas voir à un mètre de nous parce qu’à chaque 10 cm il y a un rayonnement qui nous touche.
« La moyenne de pics va jusqu’à 8 000 (µW/m2) »
La moyenne de pics mesurée par le CRIQ (Centre de recherche industriel du Québec) mandaté par Hydro-Québec était de 50 µW/m2. Oui, « mètres carrés », et non pas « mètres cubes » comme vous l’avez mentionné en répondant à une citoyenne. Les vraies lectures de ces pics sont, selon l’EPRI (l’équivalant américain du CRIQ) : 65 000 µW/m2 à un mètre de la source, 550 000 µW/m2 à 20 cm et presque 20 000 000 µW/m2 à 3 cm de celle-ci.
« C’est une onde intermittente, oui, c’est une question de définition physique, d’onde pulsée, mais vous avez tout à fait raison c’est une onde intermittente avec des pics, des hauts et des bas, des hauts et des bas, puis, en moyenne à un mètre, qui varie de 50 à 8 000 en moyenne – maintenant direct dans l’appareil c’est probablement pas ça, je vais vérifier »
Sachez qu’une onde pulsée est une onde qui est émise de manière intermittente : autrement dit, les deux termes décrivent le même phénomène. Voici un extrait d’un document du CDC (Center of Disease Control) de la Colombie-Britannique au sujet des compteurs intelligents de cette province, qui utilisent la même technologie que ceux qui sont installés au Québec : « Smart meters are designed to emit pulses that last approximately 100 to 150 milliseconds (0.1 to 0.15 seconds) at irregular intervals. » Voir p. 3, 1er paragraphe. Traduction : Les compteurs intelligents sont conçus pour émettre des impulsions qui durent environ 100 à 150 millisecondes (0,1 à 0,15 seconde) à intervalles irréguliers.
« Intermittente, mais pas pulsée dans la définition quand on dit les effets sont thermiques »
Non seulement vous faites preuve d’un manque de connaissances au sujet des émissions des appareils desquels vous devez assurer l’innocuité, mais vous admettez que vous parlez d’effets thermiques, alors que la discussion porte sur les effets non thermiques.
« Il n’y a pas de critères à l’exposition chronique parce qu’il est du non-risque »
Vous avez raison qu’il n’y a pas de critères, et c’est parce que le Code 6 n’a pas été conçu pour prendre en considération les effets non thermiques. À l’époque, la préoccupation ne concernait que les radars. Nous étions en temps de guerre et, pour cette raison, le Code 6 se basait sur une corpulence bien précise, soit celle d’un soldat de six pieds pesant 200 livres. Par conséquent, comme il n’a toujours pas été mis à jour, ce code ne tient pas compte de vous, ni de vos enfants ou de vos parents, et encore moins d’un fœtus.
L’utilisation domestique du four à micro-ondes, du téléphone sans fil, du cellulaire, du portable, des tablettes sans fil, du Wi-Fi, de la télévision et de tous les outils sans fil n’existait pas quand le Code a été conçu. Même l’ordinateur d’usage personnel n’était pas encore commercialisé. Pour cette raison, le préambule dudit Code indique : « Les mesures de sécurité et les directives d’installation décrites dans le présent Code s’adressent aux employés des ministères et des organismes fédéraux. Ces lignes directrices peuvent être adoptées par les provinces, l’industrie ou autre groupe intéressés (sic). Le ministère de la Défense nationale devra se conformer aux normes indiquées dans le présent Code, sauf où une telle conformité à la réglementation compromettrait les activités de formation et les opérations des Forces armées canadiennes, tel que jugé par le ministère. »
Vous avez bien lu, les municipalités ne sont pas assujetties au Code 6, et la Loi sur les compétences municipales leur permet d’adopter des normes environnementales pour les radiofréquences, comme pour les pesticides. Ce que Santé Canada refuse de faire, les municipalités ont le pouvoir de le faire.
« Les ondes pulsées ce sont les travailleurs qui y sont exposés, pas les citoyens »
Non. Nous sommes tous exposés à des ondes pulsées. Vous avez un cellulaire? Il émet des impulsions à une fréquence donnée (nombre de cycles par unité de temps), même quand vous ne l’utilisez pas parce que son antenne cherche en quasi-permanence une source de connexion. Les nouveaux cellulaires « intelligents » ont jusqu’à huit (8) antennes, et, même en « mode avion », ils émettent des impulsions. Pour cette raison, il est recommandé de mettre son cellulaire non seulement en « mode avion », mais aussi dans une boîte métallique, fermée hermétiquement, lorsqu’on ne l’utilise pas, surtout avant de se coucher.
« Des chercheurs les étudient pour les étudier parce qu’ils ne posent pas de problèmes »
Si je comprends bien, vous êtes en train d’affirmer que de faire des études sur les effets non thermiques est complètement inutile parce que le risque n’existe pas. Par contre, TOUS les organismes censés réviser les études affirment le contraire : plus d’études sont requises. L’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (AFFSET) l’a mentionné, tout comme en 2006 l’a fait l’Institut national de santé publique du Québec : « Le niveau de risque associé à l’exposition aux CEM pour l’ensemble de la population, s’il est réel, s’avère faible. Néanmoins, du fait que pour certains groupes plus exposés, il peut s’agir d’un risque important, l’Institut national de santé publique du Québec considère que le gouvernement du Québec devrait prendre position sur la gestion des CEM et se doter d’une approche de précaution. Cette position devra considérer d’une part, la sensibilité des enjeux autour du risque de leucémie chez l’enfant et d’autre part, les incertitudes scientifiques quant à la détermination d’un lien causal. » La raison pour laquelle il y a moins d’études qui montrent un effet non thermique est simple : la majorité des études sont financées par l’industrie. Vous l’aviez admis vous-même 3 sur 4 des études que vous avez mentionnées. On sait qu’en général, nul ne mord la main qui le nourrit. Alors, d’un côté, il y a les études financées par l’industrie qui ne montrent pas qu’il existe des risques liés à l’exposition aux CEM. De l’autre côté, les études publiées par des chercheurs indépendants (non commandités par l’industrie) trouvent des effets non thermiques. Le rapport de l’AFSSET de 2009 (pour lequel 800 publications publiées postérieures à 2004 ont été analysées) mentionne que, parmi les études démontrant un effet non thermique, 11 % sont conformes à des normes rigoureuses, et parmi les études qui ne démontrent pas d’effet, 69 % sont aussi rigoureuses — voir p. 400 (ou page 396 de la nouvelle version en ligne). Toujours selon l’AFSSET, cette fois en ce qui a trait aux études sur l’humain, 20 % d’entre elles ont trouvé un effet et 71 % n’en ont pas trouvé. Puisqu’il y a des études rigoureuses qui démontrent un effet, la logique est de faire d’autres études au lieu de continuer à polluer l’environnement. Il est tout à fait logique d’appliquer le Principe de précaution en attendant la publication d’autres études.
« Est-ce que c’est vraiment nécessaire de faire d’autres études de cohorte »
(puisque selon la position de la Santé publique les RF ne présentent pas de risques pour la santé)
Une étude de cohorte est une observation au cours de laquelle un groupe de sujets exposés à des facteurs de risque (radiofréquences/micro-ondes) est suivi pendant une période déterminée et est comparé à un groupe contrôle non exposé. L’étude Interphone est une étude de cohorte; celles du groupe Hardell aussi. COSMOS (Cette étude suivra pendant 20 à 30 ans l’état de santé de 250 000 personnes utilisatrices d’un téléphone mobile), MOBI-KIDS, etc. Ni le groupe Hardell ni REFLEX n’ont été financés par l’industrie et comme par hasard, ils trouvent des effets biologiques. MOBI-KIDS devrait être publiée en 2015-2016. Il est de plus en plus difficile, pour un chercheur indépendant, de trouver du financement. Voici une courte liste de recherches subventionnées par l’industrie : Rapport 2006 du Conseil en Santé des Pays-Bas • Rapport d’avancement 2006-2007 OMS The International EMF project • Mobile Telecommuniction and Health Research Programme 2007 • Office Fédéral Suisse de l’environnement (2007) • Programme allemand DMF (2008) • StrahlenschutzKommission (SSK 2008) • Expert Group on Health Effects of Electromagnetic Fields (IRL, 2007) • SCENIHR (UE, 2007) • FDA/FCC Sécurité des radiofréquences (USA, 2008) • Recent Research on EMF and Health Risks (Autorité Suédoise Radioprotection, 2008) • National Research Council (USA, 2008) • Natl Col Center Environ Health (CDN, 2008), etc.
En 2014, l’étude suivante était publiée : Utilisation du téléphone mobile et tumeurs cérébrales dans l’étude cas-témoin CERENAT. « CERENAT est une étude cas-témoins multicentrique dans 4 sites en France entre 2004 et 2006. […] L’association positive était statistiquement significative chez les plus gros utilisateurs en considérant une longue durée d’exposition cumulée (≥ 896 h; OR = 2,89; IC 95 % de 1,41 à 5,93 pour les gliomes; OR = 2,57; IC 95 % de 1,02 à 6,44 pour les méningiomes), et le nombre d’appels pour le gliome (> 18 360 appels; OR = 2,10; IC 95 % de 1,03 à 4,31). Les risques étaient plus élevés pour les gliomes, les tumeurs temporales, l’utilisation du mobile en milieu urbain et en milieu professionnel. Les données supplémentaires appuient les conclusions précédentes concernant une association possible entre une utilisation intensive de téléphone mobile et les tumeurs cérébrales. »
Comme pour l’étude Interphone où 10 % des sujets étaient de « gros » utilisateurs (100 heures par année ou 2 heures par semaine!), l’étude CERENAT confirme que ce sont les plus gros utilisateurs qui sont à risque. L’industrie minimise le risque, et ses alliés, tel Jack Siemiatycki, professeur à l’Université de Montréal et chercheur ayant collaboré au Groupe d’études international Interphone, disent des énormités : «Pour 90% des utilisateurs de portable, il ne semble pas y avoir de risque accru de cancer du cerveau. » « … (gliome) qui était sur le bord de signification statistique… pour un petit sous-groupe d’à peu près 10 % des utilisateurs le plus forts (plus des heures d’utilisation, plus d’années)… on pouvait regarder ce résultat comme un petit hic statistique qu’arrive par hasard… » Minutes 8 :16 à 8 :20 Radio-Canada. 10 % constitue un ratio statistiquement significatif d’autant plus si on compare l’utilisateur « assidu » des années 90 (30 minutes par jour pendant 10 ans) à l’utilisateur actuel non seulement pour le nombre d’heures d’utilisation par jour, mais surtout en considération de l’âge des utilisateurs, soit : un homme adulte dans les années 90 alors qu’aujourd’hui il s’agit de la famille entière dans toutes les tranches d’âges.
En sachant qu’en 2010, 10 % des bébés de moins de 2 ans avaient utilisé la technologie sans fil et que 40 % des enfants de 2 à 4 ans l’avaient utilisée, ne croyez-vous pas qu’il est nécessaire de faire plus d’études, afin d’avoir des données plus proches de notre utilisation de 2015? Selon vous, pourquoi la France a-t-elle, le 29 janvier 2015, adopté une nouvelle loi (La France interdit le Wi-Fi dans les crèches et le limite dans les écoles) encadrant l’exposition du public aux ondes électromagnétiques générées par les technologies sans fil (antennes-relais, téléphones mobiles, tablettes, etc.)? La semaine dernière, Taïwan a adopté une loi interdisant l’utilisation du sans-fil aux moins de deux ans. Les parents devront payer une amende s’ils sont reconnus coupables de cette infraction. Avec plus de 24 millions de jeunes accros au sans-fil en Chine (Web junkies), Taïwan recommande fortement que les moins de 18 ans réduisent leur exposition au sans-fil. Et pourquoi croyez-vous que la Belgique, depuis le 1er mars 2014, interdit l’utilisation du cellulaire aux enfants de sept ans et moins? Les données sur lesquelles nous nous basons pour prendre des décisions doivent correspondre à la réalité et nous devons tenir compte du fait que les habitudes évoluent avec le temps, Madame Samson. En effet, des études ont révélé qu’en Belgique 2 enfants sur 3 âgés de moins de 7 ans possèdent un portable et que les enfants de 12 ans possèdent presque tous un portable! C’est à ça que servent les études : à nous aider à comprendre la réalité actuelle et à ne pas baser nos croyances sur des faits d’il y a 60 ans!
« Il n’y a pas de pertinence, de rationnel, à regarder les doses inférieures si on a étudié une dose supérieure et qu’on n’a pas trouvé de problème »
Une dose de 6 000 000 µW/m2 dans le cas d’une exposition unique de 6 minutes à 900 MHz est jugée « acceptable » quand on parle d’effet thermique (effet consistant à faire monter la température d’un degré centigrade). Toutefois, la discussion porte ici sur les effets non thermiques (biologiques, sanitaires). La pratique consistant à faire une moyenne de l’exposition thermique est « acceptable », et le calcul est alors fait par des ingénieurs. Cependant, une exposition non thermique ne peut pas faire l’objet d’une moyenne : vous devriez le savoir en tant que médecin. Le corps ne fait pas de moyenne, il subit chaque onde pulsée, et l’effet des ondes pulsées sur le corps est cumulatif.
Les experts de l’effet non thermique, ce sont les médecins et les biologistes, et non les ingénieurs qui utilisent des formules mathématiques pour arriver à des seuils approximatifs d’exposition. Les études sur le cellulaire le confirment : plus on l’utilise, plus grand est le risque de développer une tumeur mortelle du côté d’utilisation. Selon le rapport de l’EPRI, les compteurs émettent des ondes pulsées (comportant des pics, soit des valeurs maximales) 9 600 à 190 000 fois par jour. Maintenant, imaginez que vous mettez vos doigts dans une prise de courant ce même nombre de fois au cours de la journée. D’après Hydro-Québec, la moyenne de ces pics pendant six minutes à un mètre de distance du compteur est de 50 µW/m2. Selon l’EPRI, les pics atteignent 65 000 µW/m2 à un mètre de distance. En faisant une moyenne pour des ondes émises par intermittence, on obtient une valeur de pics faussée (trop basse) en raison des temps morts. En suivant ce raisonnement d’HQ, l’exercice de mettre vos doigts dans la prise de courant devrait être équivalant à une caresse. Le croyez-vous vraiment? Selon le site d’Hydro-Québec, « [t]out le monde a déjà ressenti une sensation de fourmillement, de picotement, sans blessure. Ces effets peuvent survenir à des courants aussi faibles que 0,25 milliampères (sic) (mA). » Les fourmillements et picotements sont une réaction neurologique. Il convient de mentionner que 0,25 milliampère correspond à 24,1 µW/m2.
La professeure Magda Havas, spécialiste des effets biologiques des champs électromagnétiques, nous informe que des effets biologiques sont signalés à partir d’aussi peu que 20 µW/m2 (insomnie, fatigue, troubles de concentration, etc.).
Êtes-vous toujours convaincue qu’il n’est pas nécessaire de faire des études à des expositions plus basses que 6 000 000 µW/m2? Peut-être que le fait de travailler pendant un mois dans une salle de compteurs pourrait vous convaincre de la nécessité de ces études? Et vous n’y resteriez que de 9 h à 17 h… Imaginez des enfants dans une garderie où ce qui les sépare d’une salle de compteurs n’est qu’un mince panneau de gypse… Imaginez vos parents, retraités, qui passent la journée entière à côté d’un compteur ou de compteurs groupés.
« La santé publique au Québec n’est pas équipée, ne fait pas de mesures environnementales »
Qu’attendez-vous pour vous équiper? Nous sommes devant la pollution la plus dévastatrice de l’histoire de l’humanité et vous restez les bras croisés?
« Notre expertise se base sur les phénomènes d’appréciation environnementale »
Depuis quand les radiofréquences ne sont-elles pas un phénomène d’appréciation environnementale?
« S’appuyer sur la science et l’évidence »
Malheureusement, si la science et l’évidence sur laquelle vous appuyez vos croyances sont biaisées, votre croyance est faussée. Les organismes qui ont été créés précisément pour réviser cette science, choisissent souvent de ne pas réviser les études qui contrarient l’industrie. La récente révision du Code 6 par les membres du comité de révision de la Société royale du Canada en est un bel exemple. Trois membres ont démissionné. Le plus connu, Daniel Krewski, était à la tête du comité et a été accusé de ne pas avoir déclaré de conflits d’intérêts. Il avait omis de mentionner qu’il agit aussi à titre de conseiller pour l’industrie des télécommunications. Il est le porte-parole de Santé Canada qui vante l’innocuité du Wi-Fi. M. Krewski a participé à différentes études où l’effet non thermique a été remis en question et où il a été trouvé inexistant (notamment Interphone). Il n’est pas le seul qui n’était pas à sa place dans ce comité. Le rapport du comité de révision porte sur les radiofréquences de cellulaires, les tours, l’équipement Wi-Fi, les compteurs « intelligents » et toute la technologie sans fil.
Le travail du comité réviseur est à son tour vérifié par un autre comité scientifique et deux de ces scientifiques indépendants ont brisé l’omerta.
Le Dr Anthony Miller, professeur émérite à l’École Dalla Lana de santé publique de l’Université de Toronto, a déclaré que le comité de la Société royale ne va pas assez loin dans ses recommandations. Selon lui, le comité n’a eu ni le temps ni les ressources pour faire une bonne révision et, surtout, il n’a pas examiné les études plus récentes qui, depuis 2007, montrent en majorité des effets non thermiques.
Martin Blank, professeur en physiologie et biophysique cellulaire à l’Université de Columbia, est allé plus loin en mentionnant :
[Traduction] « Si l’on prend une décision scientifique, cette décision doit s’appuyer sur toutes les données pertinentes. Ils ne l’ont pas fait. Ils ont ignoré des données. Ils les ont délibérément exclues ». “If you’re making a scientific decision, a scientific decision must bring in all relevant data. They did not. They ignored the data. They deliberately put it off the table.”
La plupart des études publiées depuis 2007 n’ont pas été examinées par le comité de révision du Code 6 ni par le Comité scientifique des risques sanitaires émergents et nouveaux [CSRSEN] en mars 2014 :
- Sur les effets génétiques:
Radiofréquences[1] (RF) : 114 articles [65 % ont signalé des effets]; extrêmement basses fréquences[2] (EBF) : 59 articles[83 % ont observé des effets]
- Sur les effets neurologiques:
RF : 211 documents [68 % ont signalé des effets]; EBF : 105 documents [90 % ont observé des effets]
- Sur le stress oxydatif:
RF : 106 articles [88 % ont signalé des effets]; EBF : 110 documents [88 % ont observé des effets]
« Classé 2B comme le café, les cornichons, le formaldéhyde… non pas le formaldéhyde… comme le café »
Effectivement, dans certains pays d’Asie, le cancer de l’estomac est causé par une très grande consommation d’aliments marinés (pas seulement de cornichons). Les grands buveurs de café (plus de 20 tasses par jour) ont quant à eux tendance à développer un cancer du côlon. Pourquoi avez-vous choisi de minimiser le risque des radiofréquences en ne mentionnant que ces deux produits qui semblent à priori inoffensifs : avez-vous oublié que le plomb, le DDT, l’aflatoxine M1, le chloroforme, le diesel, l’essence, le méthylmercure, le naphtalène, etc. sont aussi classés 2B?
Vous dites ignorer l’existence d’organismes de la santé qui recommandent le Principe de précaution. Voici une courte liste d’organismes qui adhérent à cette recommandation entre 1998 et 2013 :
American Academy of Pediatrics
American Academy of Environmental Medicine
Irish Doctors’ Environmental Association (IDEA)
International Agency for Research on Cancer (IARC) and World Health Organization (WHO)
Stewart Report : 6.38, 6.39, 6.40
La liste est longue depuis la Résolution de Vienne en 1998 – 35 autres depuis. Sans oublier la Directive de l’Association médicale autrichienne pour le diagnostic et le traitement des problèmes de santé et des maladies liés aux champs électromagnétiques (syndrome CEM).
Résolution du comité national russe sur la protection contre les radiations non ionisantes. (Je vous invite à le lire au complet.)
Conseil de l’Europe : Résolution 1815
European Parliament : On the recognition of multiple chemical sensitivity and electrohypersensitivity in the International Statistical Classification of Diseases and Related Health Problems (ICD)
European Parliament : Resolution on health concerns associated with electromagnetic fields
Liste de gouvernements et d’associations d’enseignants qui recommandent de minimiser l’exposition des enfants à la technologie sans fil.
En contradiction avec ces nombreuses recommandations émanant d’organismes reconnus mondialement, des ingénieurs sans aucune expertise sur les effets non thermiques des champs électromagnétiques ont, en 2012, signé une lettre affirmant l’innocuité des ondes pulsées des compteurs « intelligents » : Technologies radiofréquences – Pour un débat guidé par la science. L’instigateur de cette lettre était Thomas Gervais, de la Polytechnique, un spécialiste des laboratoires biomédicaux sur puce financé par Lorne Trottier, grand patron de Matrox, qui se spécialise dans la conception de puces et qui est l’un des mécènes de l’Université McGill et de l’École Polytechnique. Un laboratoire sur puce est un dispositif intégré rassemblant, sur un substrat miniaturisé, une ou plusieurs fonctions de laboratoire.
Comme par hasard, tous les signataires de la lettre sont affiliés à ces deux établissements d’enseignement. Peu après, un autre groupe d’experts, cette fois des spécialistes des effets non thermiques, a signé cette lettre-ci : Compteurs intelligents : des experts dénoncent la « désinformation flagrante ».
En tant que médecin, vous serez intéressée par les travaux de recherche de l’oncologue Dominique Belpomme, environnementaliste de longue date, et de son associé le docteur Luc Montagnier, Prix Nobel de médecine pour sa recherche sur le SIDA.
Vous, tout comme Mme May Hamm, avez été informée par Hydro-Québec des avantages de la technologie sans fil et de son innocuité. Vous remarquez qu’il y a des mots, des phrases qui se répètent, tant dans le discours de l’industrie que dans celui de ses associés. Votre phrase, « S’appuyer sur la science et l’évidence », on l’entend souvent et, comme vous pouvez le remarquer, elle se trouve aussi dans la lettre des professeurs de McGill et de la Polytechnique. Voici quelques exemples de mots utilisés par l’industrie et ses partenaires pour minimiser les problèmes, induire l’auditeur ou le lecteur en erreur et détourner son attention de la véritable signification prévue dans les études scientifiques :
- Avis faisant autorité (authoritative review) = l’opinion des groupes qui pensent comme nous ;
- Rien ne prouve clairement les effets néfastes sur la santé (no clear evidence) = il existe des preuves d’effets néfastes sur la santé;
- Il y a de petits effets physiologiques = il y a des effets physiologiques;
- Sans preuve d’effets néfastes sur la santé (no definitive adverse effects) = il y a des effets néfastes sur la santé;
- Nécessité de poursuivre la recherche = une tactique dilatoire dont l’unique but est de gagner du temps Plus de recherche est toujours souhaitable pour mieux comprendre quelque chose. La vraie question à se poser, surtout lorsque la santé de la population est en jeu, est : en savons-nous, en comprenons-nous assez sur le sujet pour changer de politique?
- Associations possibles entre les champs de RF et les résultats négatifs sur la santé = il existe des associations entre les champs de RF et les résultats négatifs sur la santé.
J’espère sincèrement que vous ferez un effort pour mieux vous informer dans ce dossier. Le bon sens nous dicte d’appliquer le Principe de précaution non seulement en ce qui concerne le déploiement des compteurs « intelligents », mais aussi de la technologie sans fil. Voici, selon l’UNESCO (1999), à quoi sert le Principe de précaution : « Le principe de précaution est un guide important face aux incertitudes scientifiques spécialement dans des situations potentiellement irréversibles ou d’impacts catastrophiques. »
Pour le moment, l’utilisation sans réglementation de la technologie sans fil est irresponsable et immorale; nous sommes tous des cochons d’Inde dans une expérience qui est faite sans notre consentement. Le Code de Nuremberg visait à nous protéger et à éviter que l’histoire se répète, mais il semble que certains aient la mémoire courte : « Exposer des gens sans les informer et sans leur consentement à des champs de radiofréquences pouvant affecter leur santé, contrevient au code de Nuremberg adopté pour empêcher la répétition d’expérience comme les nazis l’ont fait sur les juifs. » C’est dommage que ni Santé Canada ni la Santé publique ne se sentent interpellés.
Veuillez agréer, Madame, mes sincères salutations.
Maria Acosta
Porte-parole Basses-Laurentides refuse
[1] Radiofréquences (RF) : compteurs « intelligents », tout appareil émettant des micro-ondes [technologie sans fil].
[2] Extrêmement basses fréquences (EBF) : tours de haute tension et câblage électrique.
Merci Maria d’avoir pris le temps de bien documenter le dossier qui fait tant défaut au sein de la DSP. Jean-Pierre Boisvert